Sagesse I La vie sans travailL'oisiveté, dit-on, est la mère de tous les vices, mais elle est aussi la mère de l'invention. Les plus grandes découvertes scientifiques ont été faites dans l'oisiveté : Galilée et son bain, Newton et sa pomme… Einstein, lui-même, était considéré comme un cancre paresseux. On profite de son temps libre pour faire les choses que l'on veut, qui nous rendent noble, et non ignoble, c'est-à-dire que ces choses-là nous élèvent et nous rendent heureux. Hermann Hesse (1908 et 1959), L'art de l'oisiveté Je tape "ne pas travailler" sur Google. Et je constate que le sujet intéresse pas mal de monde. Ne pas travailler peut-il être un choix de vie? Peut-on s'y épanouir? Et qu'en est-il de ceux qui bénéficient d'allocations payées par les cotisations des "travailleurs"? Nos copains des US, toujours en avance sur les autres, ont déjà créé un nouveau mot (funemployment) pour qualifier la jouissance assumée du temps libre qu'offre le « manque d’emploi » (unemployment). De janvier à mai, cinq mois, je ne travaillerai pas. Je ne serai pas non plus sur les routes. Je serai juste chez moi, sans obligations, sans objectif précis. Peut-être devrais-je encore terminer beaucoup de choses dans la maison, mais peut-être que non. Et ce qui m'apparaissait comme un rêve – avoir tout le temps du monde pour faire CE-QUE-JE-VEUX – me semble soudain être à double tranchant : et si je n'en faisais rien? Et si je passais mes journées en pyjama, incapable de trouver un sens à mes journées, rongée par la culpabilité de pomper le fric des autres sans véritable justification? Le travail est «un fait social total [dont] l’absence est devenue quelque chose d’absolument insupportable», écrit la sociologue et philosophe Dominique Méda dans son ouvrage Travail : la révolution nécessaire (2010). Comme je le lis encore sur le site de www.psychologies.com, pour beaucoup d'entre nous, " bon gré mal gré, le travail reste le terrain privilégié de l’accomplissement des potentialités et de la réalisation de soi. Selon les sondages, il constitue plus que jamais, pour les Français, la deuxième valeur après la famille". L'auteur conclut que, dès lors, le passage d'une vie structurée par un job à plein temps, à une vie sans emploi, ne peut être réussi qu'à condition d'être capable de " se construire une nouvelle identité, un nouveau moi ". C'est quand même tout un programme… Ma hantise des journées devant la télé à manger des choco pops, mes cheveux gras relevés en un triste palmier au sommet de mon crâne… Arrêter de travailler pour se consacrer à une passion, à ses enfants, à un projet… C'est une chose; On sait pourquoi, on sait où on va. Mais arrêter de travailler juste comme ça, pour expérimenter autre chose, se donner du temps… c'est flippant. Surtout quand c'est prémédité et pas lié à un pétage de plomb, réflexe de survie face à une situation professionnelle invivable. Il y a plein de choses que j'aimerais faire si j'avais plus de temps : cuisiner (végétarien, bio et sain… et trop bon évidemment), coudre, bricoler, créer un potager, développer mon blog, profiter de la nature, randonner, créer mes propres produits d'entretien, lire et apprendre… Mais j'ai peur de n'avoir aucune autodiscipline et de passer mes journées affalée dans mon canapé à éteindre mon cerveau à coup de téléréalités. Je n'ai jamais eu à m'imposer un rythme toute seule, sans structure, sans obligations. Comment m'organiser sans but, sans objectifs? Devrais-je me faire un programme quotidien? Hebdomadaire? Et puis je me demande combien de temps on peut passer toutes ses journées à faire des choses qu'on aime, sans chercher à atteindre quelque chose de précis. Peut-être devrais-je me challenger moi-même, me mettre au défi de devenir la reine des fourneaux ou de maîtriser l'art de faire pousser les carottes comme personne. Ou peut-être que je devrai me trouver une cause pour laquelle agir, une association à laquelle offrir mes services… Je suis convaincue que le travail n'est pas la vie, qu'il ne nous résume pas. J'essaye d'ailleurs de ne plus demander aux gens que je rencontre "ce qu'ils font dans la vie", parce que je ne veux pas que les gens soient forcés de se définir par cette réponse. Mais j'ai toujours pensé qu'on a tous besoin de trouver un sens à ce que l'on fait. Peut-être que le sens de cette démarche est un peu plus subtil. Peut-être que je me donne tout simplement du temps pour me trouver. Pour explorer mes talents, mes envies… Pierre Blanc-Sahnoun, coach et auteur de L’Art de coacher (InterÉditions, 2006), pense que décider d'arrêter de travailler c'est "sortir d’un modèle culturel convenu, prescrit, pour entrer dans un processus individuel de redéfinition de sa vie : quel genre de personne avons-nous envie d’être, que voulons-nous atteindre ou réaliser, avoir ou être, valoriser et honorer ? Cela témoigne d’une volonté de quitter une identité dominante – où le travail définit la personne – pour exprimer une identité préférée – via une activité en accord avec le sens que l’on veut donner à sa vie et les valeurs que l’on veut affirmer. On passe de l’emploi imposé à l’activité voulue. C’est donc un choix identitaire". C'est peut-être aussi réapprendre l'oisiveté, comme la définit Hermann Hesse : L'oisiveté est l'art de l'oiseau. Ce qui compte, pour l'oisif, c'est l'instant présent, un nuage du soir qui se croit poisson rouge, un concert de grande musique, une nuit d'insomnie aux bruits infinis, un retour éphémère dans la ville de l'enfance, un paysage peint dans un village tessinois, une forêt sous la neige. On ne peut que se désoler du rythme du monde. [L'oisif] se réjouit de passer des jours entiers à se passionner pour la couleur des zinnias. On l'envie. Et puis, j'ai lu des témoignages. Ceux qui ont quitté le marché du travail sont unanimes : ils s’activent plus qu'avant, et mieux que jamais. Sur psychologies.com, Robert, 47 ans, conseille : « N’ayez pas peur du vide, il se remplira très rapidement ! » Je vais écouter Robert…
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Comme je l'ai lu (dans un magazine Respire, je crois), l'Homme peut donner un sens à sa vie de deux manière : en apprenant et en prenant soin des autres. Brevet de navigation, photographie, leçons de vie... Je partage avec vous mes petites et grandes découvertes.
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